Un lecteur, Nicolas Berthon, ostéopathe humain et équin de son état, a écrit pour le blog une proposition d'échauffement du cavalier que je m'empresse (avec un poil de retard) de vous transmettre.

Cet article fait suite au post dans lequel Eugénie fait part de son énervement à la lecture des propos de K. Staut découvrant l'entraînement physique du cavalier.

Il est en effet surprenant de lire ou entendre les meilleurs cavaliers du monde parler de leur absence de préparation physique. Il ne faut certainement pas mettre tout le monde dans le même panier, puisque chacun peut citer un cavalier célèbre ou de sa connaissance qui a compris l'intérêt d'une vraie préparation à l'effort, et la met en pratique. Mais cela témoigne de la force de l'habitude et de l'inertie d'un milieu qui ne considère visiblement pas les humains comme des sportifs, et puis il faut reconnaître que K. S. avait été numéro 1 mondial sans ça.... ça ne pousse pas à la remise en question ! Sans même parler de préparation physique, beaucoup de lecteurs avaient exprimé le fait qu'on ne leur avait jamais parlé d'échauffement. Je me suis donc dit : pourquoi ne pas proposer un petit article sur ce sujet ? Et voilà !

Quel est donc l'intérêt et le but de l'échauffement ? L'échauffement est là pour préparer le corps à l'effort. Il permet de réveiller les muscles, les articulations et les nerfs endormis par les longues heures passées au travail. Même si ce n'est sans doute pas primordial en équitation, il fait monter le rythme cardiaque, et permet au système cardio­vasculaire de s'adapter à l'effort qui va suivre. Pendant l' échauffement, la température corporelle s'élève, les mouvements se fluidifient, et le sang est redirigé vers les zones qui en auront besoin. En réveillant le système neuro­musculaire, la coordination musculaire s' accroît, améliorant ainsi l'efficacité du geste. Tout ceci contribue à la prévention des blessures : les muscles fonctionnent mieux, et se contractent à bon escient : au bon moment, ni trop, ni trop peu. C'est enfin un moment d'éveil du corps à la conscience, qui amène la concentration propice à la performance, ou au moins au geste juste. A cheval, ce n'est pas rien !

Plus spécifiquement, l'échauffement du cavalier visera à réveiller la proprioception et la tonicité du rachis dans son ensemble, celle du bassin, à délier les épaules et les hanches, à relâcher les 4 membres, à mettre en route l'indépendance des aides et le "liant". Vaste programme...qui débute par un bon coup d'étrille, de brosse, et de cure­pied ! On lève les bras, on plie les genoux, on se penche, bref, ça réchauffe, les articulations et les muscles s'activent, le cœur monte en rythme : c'est un bon début. On veillera quand même, pendant le curage des pieds, à fléchir les genoux et à garder le dos le plus droit possible. On peut aussi se permettre quelques fentes avant et latérales. Ensuite, il est bien sûr possible de poursuivre l'échauffement au sol, mais on peut aussi le faire à cheval : ce sera mon parti pris, parce que c'est moins rébarbatif quand on n'est pas sportif, ça fait penser à la mise en selle, et ça passe sans doute mieux si on ne souhaite pas être le centre d'attention du centre équestre tout entier.

Et nous voilà à cheval. Comme notre monture est aussi rouillée que son cavalier, s'il sort du boxe, et que, de toute manière, lui aussi doit s'échauffer, on profite des 10 à 15 minutes de pasréglementaires pour finir notre petit échauffement. Pour commencer, on fera attention à sa position : si les conditions le permettent, on ferme les yeux et on passe en revue notre attitude des pieds à la tête. cela permet de sentir les raideurs, les tensions, les défauts, mais aussi... ce qui va bien. Avec la pratique, on voit vite les différences d'un jour à l'autre. C'est un bon exercice de prise de conscience du corps. Comme les étriers sont déchaussés, on laisse descendre les jambes de tout leur poids et on laisse aller le bassin le plus librement possible.

Puis on commence à s'activer un peu : on touche les oreilles de notre vaillante monture, puis les épaules l'une après l'autre, la croupe à droite puis à gauche. Une fois revenu à la verticale, quelques rotations du tronc compléteront la mise en route du rachis. On poursuit avec les chevilles, en remuant les pieds de haut en bas, en décrivant des cercles avec les pointes, puis en les rentrant et en les sortant. On veillera à NE PAS faire la même chose en même temps avec les deux côtés ! un peu de coordination n'a jamais fait de mal à personne... Un peu plus haut, c'est au tour des genoux de bouger l'un après l'autre : en avant pour une série de flexion, en cherchant à ramener les talons vers l'arrière de la cuisse. Toujours plus haut, on vise la libération des hanches : on monte les genoux alternativement, et surtout on laisse bien redescendre les jambes librement, en retenant le moins possible.

Voilà déjà un bon bout de fait ! Restent les membres supérieurs : de grands cercles avec les épaules feront l'affaire pour mobiliser les omoplates, complétés par un enchaînement de haussements d'épaules et de relâchement. Et toujours, puisqu'il est question d'indépendance des aides, on ne fait pas la même action simultanément des deux côtés. On alterne, on fait l'inverse (une épaule tourne vers l'avant, l'autre vers l'arrière...), mais c'est comme à l'école : on ne copie pas! Pour finir, on s'étire, comme au saut du lit.

Ça y est, nous voilà parés pour finir la détente au pas d'une façon plus active, pour le sportif du dessus comme pour celui du dessous, et pour enfin commencer à travailler !

Remarque 1 : ce petit programme est une suggestion de ce qu'il est souhaitable de faire, mais évidemment, chacun doit l'adapter à ses possibilités du moment. Si ça tire un peu, ça va, mais si ça fait mal, on ne fait pas !

Remarque 2 : Cet article concerne l'échauffement. Bien s'échauffer ne permet pas de compenser des blocages ou des raideurs limitant certains mouvements et causant des dissymétries préjudiciables pour nous et pour notre aimable moyen de transport. Il est donc bon de faire régulièrement une petite visite chez l'ostéopathe d'une part, cette visite pouvant être parfois complétée par des séances de rééducations chez un kiné d'autre part, surtout si ce dernier pratique une méthode du type « Chaînes Musculaires », méthode « Busquet » ou « Mézière » par exemple.

Remarque 3 : Une activité physique ou un sport autre sont de bons compléments, et permettent de faire travailler d'autres muscles et d'une façon différente de l'équitation. Une autre manière de travailler sur la coordination ! Selon que l'on recherche un effet sur la condition physique ou la coordination et le schéma corporel, on s'orientera vers une activité différente : course à pied, vélo ou natation, mais aussi danse, yoga ou même sophrologie pour le travail sur le mental associé à la prise de conscience corporelle. L'équitation, ou la remise en question permanente...