Bon, et sinon, à part une organisation un peu faible, que retenir de ces Jeux?
On se doutera bien que je n'ai pas eu les moyens de bosser là-bas en tant que "saddlefitting.fr" (très très chers, les stands exposants!) Je me suis donc débrouillée pour me faire embaucher pour l'occasion par un sellier avec qui je travaille, Stübben. J'ai déjà parlé d'eux à plusieurs reprises, et il m'a déjà été reproché de manque d'objectivité vis-à-vis d'eux.
En effet, je manque d'objectivité puisque aujourd'hui, j'estime qu'au niveau du rapport qualité / prix, des options de fitting (grand nombre d'arçons différents, ouvertures d'arçon réglables, matelassures laine) et de personnalisation, de la qualité des matériaux et notamment de leur arçon absolument unique techniquement, c'est pour moi la marque la plus intéressante à travailler dans une optique de fitting cheval / cavalier.
On peut aussi parler de leur éthique : arçons fabriqués dans un CAT dans le sud de la France, cuirs tannés végétal en Suisse ou en Allemagne, accessoires et selles entrées de gamme fabriquées en UE (et pas au Maroc ou au Pakistan!)
La politique commerciale instaurée en France est remarquable : on a passé tous les JEM à dire aux gens : "alors non, vous ne repartirez pas du Village avec une selle sous le bras. On vous fait essayer quelques modèles pour que vous vous fassiez une idée, et si ça vous plaît, on prend RDV et on voit d'abord votre cheval, et vous ensuite" ; autant dire que ça, ça me plaît! (et ça change des gugus dont les selles vont à tous les chevaux) (et ça a aussi beaucoup plu aux visiteurs)
Et puis en tant que cavalière, j'ai eu beau essayer des dizaines et des dizaines de selles, je n'ai jamais été aussi à l'aise, aussi précise et aussi bien positionnée que dans ma selle que j'ai depuis quelques mois maintenant, et mon poney difficile à seller l'est parfaitement avec son Edelweiss Dressage.
Aparté terminé.
Donc, stand Stübben. 100m² de débauche de selles, de bridons, de mors, de produits tous plus chouettes les uns que les autres, à quelques bizarreries près.
Truc cool : Véronique Corbeau-Passadori, d'Equi'Idéal (Alsace), nous avait prêté son simulateur équestre "Mimi" (le simulateur de Peteris Klavins) pour qu'on puisse faire essayer des selles de façon un peu plus poussée aux personnes intéressées, tout en ayant une démarche pédagogique sur la position et le fonctionnement AVEC la selle. Ce type d'essai permettait aux cavaliers de sentir directement si la selle pouvait leur correspondre ou pas du tout, et nous permettait de ce fait de retenir les modèles les plus adaptés pour les futurs essais à cheval. Evidemment, gros buzz. Le site "TheHorse.com", un peu une Bible quand même, a même cité Mimi en n°1 de son top 10 des trucs fun à voir au Village des JEM. Effet de manchette, roulement de tambour, annonce : Mimi sera à EquitaLyon, toujours sur le stand Stübben =)
(et pour nous c'était cool aussi, parce que quand y avait pas trop de monde, on pouvait travailler notre trot assis ou tester toutes les selles qu'on n'avait pas encore testées)
Bon. En gros ma mission c'était d'être vendeuse, chose que je n'avais jamais faite puisque je suis fort mauvaise commerciale (tu m'envoies vendre un frigo à un Esquimau, c'est lui qui réussit à me vendre des glaçons). Ma foi, c'est plutôt amusant de jouer à la marchande, mais bon c'est pas mon rêve de tous les jours.
Le truc que j'ai préféré, clairement, c'était le côté international de l'évènement (alors oui, parler anglais couramment, ça aide). Comme Stübben est internationalement connu, on a eu des visiteurs de partout partout dans le monde entier parce qu'ils connaissaient la marque, et tous avaient leurs souvenirs de selles Stübben à raconter. Et de fil en aiguille, on élargit le champ de discussion, et on papote.
Alors j'ai pu commenter le cross avec un couple de cavaliers néo-zélandais, disserter sur la qualité du GPS vs la Kür de Charlotte avec trois Anglaises adorables, froncer les sourcils devant une dame canadienne qui me demande des renseignements sur ??? avec un accent à couper au couteau (j'ai compris après qu'elle voulait une paire de rênes), accueillir avec un "we really like you" trois sud-africaines qui ont lâché pour environ 300€ de briderie / jour pendant toute la durée du CSO, comparer les mérites d'un assortiment bordeaux / noir par rapport à un rouge / noir pour la frisonne d'une dame australiene, manquer de m'évanouir devant le porte-feuille rempli de billets violets de trois bombasses ukrainiennes, échanger passionnément sur la thématique "dorsalgies du cheval et relation à la selle" pendant 45 mn avec une véto polonaise qui se trouve être la femme d'un éminent véto français - et me retrouver à lui serrer la pince tout naturellement quand il est venu chercher Madame, présenter les selles à un monsieur de Cheval Pratique et à un autre de Jour de Cheval...
Bref je pourrais parler des heures des gens rencontrés. J'adore échanger au débotté avec des inconnus complets sur notre passion commune. J'ai adoré ça, des JEM, en fait : pouvoir discuter très facilement avec des gens qui viennent d'un peu partout, qui ont forcément une vision et une culture équestre différentes, mais qui ont tous fait le déplacement parce que rassemblés par l'amour du cheval. Il y avait les visiteurs du stand certes, les cavaliers, ce manager de l'équipe de dress brésilienne dont la "pouliche" s'est faite sortir du rectangle parce que son cheval s'est mis à boîter subitement (renseignements pris, il s'est fait une frayeur entre le paddock et la carrière, et s'est tordu la patte) (quelle beauté cette cavalière, d'ailleurs!) - et puis tous les bénévoles aussi, les P'tits Verts, et leur top cheftaine July qui nous a bien arrangés quand on était dans la panade avec les inondations.
Ca c'était l'entrée du stand...
Et puis je n'oublie pas les gens qui me connaissaient, et qui sont passés me voir juste parce que j'étais là, et même qui m'ont demandé d'essayer des selles juste parce que j'étais là. Ca, ça fait toujours plaiz! (RDV à EquitaLyon aussi ;-)
Et puis bon. Il faut dire aussi une chose : on avait pris l'abonnement EquidiaPlay, squatté la connexion Wifi d'AllTech, et branché une télé sur le stand pour regarder toutes les épreuves en direct. Parce que non, je n'ai vu AUCUNE épreuve des Jeux.
On a juste réussi un jour à s'échapper 15 minutes pour aller s'extasier sur la détente du dressage de l'attelage, dont la carrière était située juste de l'autre côté du Village. Sérieux, j'ai déjà du mal à faire des trucs corrects en étant SUR un seul cheval, et eux ils en ont 4, à raison d'une guide par tête de pipe, et ils font des trucs de malades. Méga méga respect. Et les chevaux sont super bien mis, magnifiques, tendus, ça trotte avec un rythme fabuleux, les voitures sont élégantes, les tenues du meneur et des grooms très chic : ça jette grave.
Enfin du coup voilà : on a pu suivre certaines épreuves, quand l'affluence était moindre, à la télé. Bien sûr, la tournante du jumping et ces p*tains de 43 centièmes, en oubliant de manger une mauvaise glace à l'italienne nous dégoulinant sur les doigts tellement la tension était à son comble. Bien sûr, quelques passages sur le cross (Rodolphe Et j'ai loupé le direct sur la Libre de Jacques Ferrari, et l'arrivée groupée des Français en endurance, et le passage du frison sud-africain en dressage, et la victoire française en mania d'attelage (juste en mania), et le marathon d'Excell qui paraît-il était déchaîné, et sûrement plein de trucs en fait.
Alors oui, on peut critiquer le sport équestre parce que le respect du cheval en tant qu'animal "n'est pas nécessairement à son paroxysme" (pour les fâcheux : guillemets = ironie, c'est là une figure de style qu'on appellera litote) ; mais quand on voit le plaisir et la fierté que peuvent transmettre ces athlètes à 4 pattes lorsqu'ils SAVENT qu'ils ont rempli leur contrat (la tronche de Valegro à la remise des médailles, tellement sûr de lui! et gros bluff de la part des attelages encore une fois, les chevaux communiquent entre eux de façon incroyable), je crois bien que l'équitation est le plus beau sport du monde malgré tout.
En tout cas, si l'organisation était parfois "aléatoire", on doit quand même avouer que les obstacles du jumping et du cross étaient magnifiques (sauf la main qui tenait les pinceaux, ultra-flippante) ; que le stade de foot reconverti en stade équestre donnait grave envie d'aller jouer de la corne de brume et chanter "Galette saucisse je t'aime" version poney (hymne des supporters de Rennes - je me suis cultivée cet été!) ; que l'horloge Rolex du marathon était diaboliquement excitante ; que la voltige, malgré les paillettes et la course d'entrée ridicule, c'est étrangement émouvant ; que les reiners s'y connaissent quand il s'agit de mettre l'ambiance ; que l'endurance sur fond de Mont Saint Michel (qui devrait être breton!) ça pète quand même grave.
Force est aussi d'avouer que le Village des Jeux, c'était quand même un chouette endroit, où on a vu passer des Barbes empomponnés, une zorse et son Australien à chapeau, la Garde Républicaine un peu trimballée, Magdalena Pommier et son magnifique piaffer en cordelette, Gillian Higgins que je REGRETTE de n'avoir pas pu écouter à 100% dans toutes ses interventions... Où entre les exposants une sorte de solidarité se crée, et où on finit par troquer deux casquettes Stübben contre deux polos Forestier.
(la photo vient d'un article qui résume pas mal - en anglais)
Et moi, je dois avouer que, 10 ans plus tard, ça m'a fait trop plaisir de retourner à Caen, où j'ai passé les deux meilleures années d'études de ma vie ; où j'ai eu mes premières vraies sensations à cheval avec "ma" trotteuse ; où, en fait, je me suis rendue compte que même en étant exilée dans un endroit où la boue n'est pas un problème estival, la Normandie c'est toujours un peu chez moi.
- FIN -
Tu écris toujours aussi bien et c'est toujours un plaisir de te lire. Beaucoup d'émotions dans tes écrits. Merci
(finalement c'est peut être mieux qu'un pouce tourné vers le haut...)