Salut salut!

J'en vois déjà qui se pâment rien qu'à voir que je publie quelque chose pour la première fois depuis 150 ans, au bas mot ;-) hé non, je suis pas morte! J'ai juste (un peu) du travail... Alors, je suis navrée, j'ai failli à ma promesse de vous livrer des chroniques quotidiennes des Jeux. Donc pour me faire pardonner, je vais vous livrer un gros pavé sur les Jeux.

Panem & circenses : du pain et des Jeux, ou le meilleur moyen de tenir la plèbe dans sa fange démagogique pour ne rien en craindre, d'après Juvenal et Hunger Games. Sauf que dans ce cas précis des JEM 2014, les organisateurs ont inversé les termes du problème, et ont appliqué le concept de fange à leur événement, avec pour résultat tout à craindre de la plèbe des visiteurs ;-) au prix des billets pour les compétitions, et à voir les matelas de biffetons de 500 balles dans les porte-feuilles Louis Vuitton qu'on nous exhibait régulièrement, c'est d'ailleurs pas franchement la plèbe mondiale qui s'est déplacée mais plutôt la jet-set.

Fange au sens premier du terme : en Normandie, scoop (de la part d'une Normande de naissance, c'est dire si je sais de quoi je parle), IL PLEUT. A Caen, deuxième scoop : la Prairie, où était situé le Village des Jeux (donc là où étaient réunis tous les exposants) est en fait un ancien marécage asséché bordant la vallée de l'Orne... qui dit marécage, néanmoins, et qui dit pluie, dit "problème". On a débuté les 15 jours de Village les pieds dans l'eau. Alors je ne tape pas sur l'organisation en temps réel, parce que les Petits Verts (surnom des bénévoles et des membres du commissariat général) ont été réactifs au possible avec leurs petits moyens et face au déluge que l'on s'est payé au bout de 2 jours (notre stand était littéralement entouré d'une douve, et il fallait traverser des ponts levis pour y accéder, mais le PMU s'est retrouvé inondé et l'électricité a sauté à peu près chez tout le monde au moins une fois).

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Source photo : Ouest France

Enfin, y en a un qui a fait fortune la première semaine, comme illustré ci-dessus en bas à droite : c'est Dubarry et ses super bottes. Chères, peut-être, mais au moins, on garde les pieds au chaud et au sec!

 

Mais je mets un gros coup de pied au cul à l'organisation d'anticipation, qui n'a visiblement pas réfléchi à ce problème en amont, et n'a pas du tout préparé le terrain. De fait, on était dans une sorte de terrain vaguement vague, pas du tout plane, avec des cailloux dans lesquels s'ensevelissaient régulièrement les fauteuils roulants et autres poussettes, cailloux alternant avec de la terre battue, un peu d'herbe et de vagues allées bétonnées... bref : c'était moche, pas pratique, et inondable. Les "gens du bout" (= exposants qui étaient à l'opposé de nous, devant le Zénith) ont même du faire un sit-in pour qu'on leur mette des gravillons pour accéder à leurs stands, parce qu'avec la pluie, c'était juste Verdun pour eux et leur petit chemin de terre... 

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Et encore, je ne parle que du Village des Jeux ; il faut savoir que c'était aussi le cas pour les compétitions d'outdoor, à savoir le complet et l'endurance, qui avaient lieu la première semaine, pile celle où il a plu. Pour l'endurance, d'ailleurs, la réaction de Jean-Philippe Frances (cavalier de l'équipe de France médaillée d'argent et 8e en individuel) pour Grand Prix que j'ai trouvé citée sur un forum a été supprimée du site... il a dit ce qu'il fallait pas dire, peut-être? en tout cas, ses propos étaient sans équivoque sur la qualité et la difficulté du terrain. Chapeau à l'équipe pour avoir su gérer le terrain compliqué malgré tout, et pour leur belle sportivité avec un finish d'équipe en tir groupé, c'est chic de jouer collectif.

Source photo : France 3 Normandie

Pour le complet, ils ont retiré deux obstacles, heureusement ; mais le terrain était lourd et fouillant, le parcours apparemment très long, plusieurs chevaux ont été arrêtés par les commissaires car pas en état de continuer, et y en a quand même un qui a cassé sa pipe à l'arrivée. Tristement, ça arrive, c'est un peu le jeu du complet que de repousser loin les bornes des limites (sans émettre mon avis personnel sur la discipline et en essayent de considérer les choses avec objectivité), mais ça fait désorde quand même...

queue

Le truc amusant, ou grinçant plutôt? c'est qu'on savait avant même les Jeux que le cross allait être un franc bordel ; forcément, c'est un moment-phare des compétitions, donc tout le monde s'est précipité dessus pour avoir des places. Parkings, buvettes et chiottes sous-dimensionnés, overbooking à plus de 200% de la capacité du site, accès ultra mal balisé... Ca s'était déjà un peu vu au dress du complet, parce que malgré le mauvais temps, y avait de sacrées files d'attente aux deux pauvres buvettes qui se battaient en duel. Et pourtant comme chacun sait : y a jamais personne au dress du complet.

Oui la photo bugge je sais pas pourquoi...
Source : EventingNation

L'article d'EventingNation vaut d'ailleurs son pesant de noisettes. 

Extrait : "Le dressage vient à peine de s'achever, et, à l'heure où nous écrivons, des centaines de spectateurs qui veulent juste se tirer de cet enfer vite et bien se retrouvent face à une nouvelle surprise : leurs voitures sont embourbées. Il y a carrément des tracteurs qui les remorquent une à une.

Bah! allez, y a pas l'feu au lac. Ca aurait pris des heures à sortir du parking, vu le monde, et à retrouver son chemin sur les petites routes de campagne. On n'a qu'à retourner aux stands et se payer une bonne crêpe et un verre de vin. Bonne chance! S'il y a une surabondance de boue, il y a sous-abondance de provisions... A l'heure du déjeuner, les spectateurs ont poireauté en de longues files ridicules aux deux seuls stands de nourriture prévus..." (rappelons que pour le cross, on attendait 50 000 visiteurs).

Quand on sait que pendant ce temps-là, au stade d'Ornano, les tribunes étaient intégralement vidées entre midi et deux pour éviter les resquilleurs "j'achète ma place le matin mais je reste en fait toute la journée", qu'autour du stade il n'y a RIEN pour se poser tranquillement, et que les deux pauvres sandwicheries du stade étaient... roulement de tambour... fermées entre midi et deux!
Sachant également qu'on est à 30 mn à pied aller simple du Village exposants, donc 1h A/R, soit 1h à peine pour faire un tour dans les stands et se taper un sandwich trop cher et probablement pas très bon... Quand tu viens de l'autre bout du monde et que tu as payé ton package JEM fort cher, t'as un peu les boules. T'as même beaucoup les boules. Même quand tu viens de Normandie d'ailleurs, t'as les boules, et t'as un peu honte aussi. Tendre pensée aux volontaires qui ont passé leur temps à prendre cher pour les organisateurs probablement bien planqués au chaud.

Allez, blague suivante : déjà, 50 000 spectateurs sur 11ha, c'est un peu beaucoup quand on prend en compte le facteur "chevaux lancés à toutes blindes sur un parcours casse-gueule, montés par des têtes brûlées pas forcément bons pilotes". Enfin, pour ce point-là, pas de casse à déplorer a priori. Dieu merci. Si en plus de tuer des chevaux la mauvaise organisation avait expédié quelque touriste étranger et fortuné ad patres, là ça aurait craint grave et il n'y aurait plus eu lieu de faire de l'humour. Les vies humaines étant sauves, on peut continuer à ricaner. MAIS. Méga-mais. Quiconque a déjà mis les pneus de sa bagnole dans l'Orne aux alentours du Haras du Pin connaît l'état des routes... petites, tournantes, et où l'on se perd facilement. Donc, prudents, les spectateurs ont suivi l'itinéraire principal balisé. Certains, partis à 8h de Caen, feront demi-tour à 14h sans avoir vu le moindre crampon, écoeurés par les bouchons...

A propos de transports. L'inconvénient majeur du site était sa pluralité. Pas un, mais plusieurs sites. Donc OK, bouchons pour aller au Pin, l'endurance à perpet', c'est bien remarque, ça fait visiter la Normandie, c'est très beau la Normandie. Mais à Caen-même-que-c'est, y avait les épreuves de dress, de saut et le saut du complet au stade. Pour aller au stade, il fallait prendre des navettes-bus (ou marcher au moins 30 minutes). Que y en avait pas assez et que c'était la foire d'empoigne systématique pour y monter, des navettes. Ou qu'elles étaient prises, elles aussi, dans les bouchons... résultat : 

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Source photo : Normandie2014

Voyez le p'tit mec au milieu? c'est l'équipe d'Espagne à lui tout seul. En fait non. Ses coéquipiers se sont retrouvés bloqués dans les bouchons, et n'ont pas pu recevoir leurs médailles avec les honneurs dus - parce que la remise des médailles a eu lieu pendant la Kür, et qu'il fallait pas prendre de retard... Classe! (source de l'info : Equidia)

Donc, note pour les prochains JEM : on recommence comme à Lexington, on fait du tout en un... ça tombe bien, c'est ce qui est prévu à Bromont - Montréal! (à voir les premières photos du site, ça promet d'être splendide).

Et si je dois encore revenir sur les questions qui ont directement concerné les exposants au niveau de l'organisation, je dirais bien que 4 semaines avant le début des Jeux, mon patron pour l'occasion ne savait pas où on allait être, ni quelle surface on allait avoir ; qu'on a eu nos pancartes signalétiques 10 jours après le début de l'événement "parce qu'on avait oublié", tiens donc ; que nos amis les voyagistes (bisou à Cheval d'Aventure), hormis leur combat pour une circulation libre de tout danger, ont vu leurs stands montés à la dernière minute, mais vraiment dernière dernière ; qu'ils n'avaient pas d'éclairage une fois le soir tombé, aussi, là-bas tout au bout du Parc ; que d'autres ont changé de stand en pleine expo parce que là où ils étaient, y avait juste personne qui venait... bref.

Le commentaire le plus fréquemment entendu : "même la fête de mon poney-club est mieux organisée que ça". Ca craint non?

Dieu merci, ça évitera probablement d'avoir à ré-organiser ce genre de trucs d'ici les 80 prochaines années, et donc de limiter les dépenses publiques inutiles (non parce qu'il y en a des bien, des scandales liés à l'argent de l'organisation et à ces Jeux. Mais je ne vous raconterai pas, d'autres le font mieux que ça, et puis là c'est pas drôle du tout donc je peux pas me permettre d'être moqueuse)

Demain, la suite! (ou lundi. Ou mardi)