Chers petits, 

Je n'ai pas traité encore du sujet du confort d'une selle pour nos fesses de cavalier.

Je n'oserais pas vraiment le faire, parce que les pages les plus brillantes que j'ai pu lire sur le sujet ont été écrites par Monsieur Emile Brager, dans son grand oeuvre "Techniques du voyage à cheval". Je ne saurais que recommander la lecture de cet ouvrage, même quand en guise de voyage à cheval on se limite à des petites promenades de mamie autour de l'écurie sans trop oser s'éloigner, parce qu'il est extrêmement riche en enseignements. J'ai déjà parlé de ses pages sur la sellerie, qui sont remarquables.

Et donc, dans ces pages sur la sellerie, il fait une distinction extrêmement intéressante sur le confort de souplesse et le confort de forme. Le confort de souplesse, c'est l'accumulation sous les fesses de mousses amortissantes et autres douceurs. Le confort de forme, c'est l'adéquation de la forme de la selle à l'anatomie du cavalier, qui permettra, malgré une "souplesse" réduite, d'être extrêmement confortable sur la durée parce que plaçant le cavalier dans une position sans effort. En réalité, le confort de souplesse, même s'il est agréable au début, ne sauvera pas une conception inadaptée, et entraînera des désagréments sur le long terme. Ce qui n'est pas ce que l'on recherche lorsque l'on voyage à cheval, vu qu'on passe le cul dans sa selle des heures et des jours durant (voire des mois).

BREF : la forme prévaut. Pour le reste, lisez Mimile!

EDIT : Monsieur Guichard, sellier d'extérieur et d'expérience, ne parle pas autrement. Son texte a 10 ans, et est toujours d'actualité.

Et j'en veux pour preuve cette expérience du week-end.

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Rendez-vous était pris dimanche dernier avec une cavalière de dressage d'un bon niveau, avec son compagnon de toujours, un lusitanien de 18 ans. Ma cavalière souffrait d'un désagrément particulièrement gênant : c'est une Princesse au Petit Pois, et elle ne pouvait pas passer plus de 15mn en selle sans se blesser le fondement à sang. Plus d'une, moins passionnée, eut lâché l'affaire ; dans ces conditions l'équitation n'est pas du tout une partie de plaisir.

Mais notre Princesse continuait à s'acharner, vaille que vaille. En désespoir de cause, il y a 3 ans, elle s'est faite fabriquer une selle de dressage sur mesure par Jean-Jacques (nommé Boulet d'Or par plusieurs de mes lecteurs, au passage). La selle, à voir comme ça, est très belle, bien équilibrée, pas d'asymétrie. En regardant la cavalière, je vois que le sellier a bien pris ses mesures, "ça colle" ("it fits", diraient les Anglais).

Sauf que, haha, Jean-Jacques n'a pas DU TOUT pris en compte la morphologie très particulière du Palefroi de notre Princesse, qui à l'instar de bien des ibériques a une épaule TRES oblique et un passage de sangle RIDICULE. Et en plus, ce bougre a du garrot, et il fait pas semblant. Donc la selle est fabriquée pour un dos bien tendu de cheval de dressage, avec un sanglage au centre de l'arçon très reculé, qui tombe au milieu du bide du grand bidet... Ah oui, ce même Jean-Jacques, il dit adapter la selle aux chevaux, mais il dit aussi que l'emplacement du sanglage n'est pas déterminant. "lolilol", si vous me passez l'expression.

Ce qui se passe donc, c'est que Princesse selle sur le garrot pour aligner le sanglage sur le passage de sangle, coince les épaules, comprime dans la foulée les muscles dorsaux, et le Palefroi passe sa vie à faire la grimace. Et comme la selle est perchée le pommeau 10cm au-dessus du troussequin, je vous laisse imaginer ce que ça peut faire au "devant" de Princesse. Donc compensateur à l'arrière pour rééquilibrer tout ça, mais bon évidemment, ça équivaut à mettre un pansement sur une jambe de bois. Donc Princesse morfle, dignement, et le Palefroi aussi, avec sa grande face auguste résignée et son nez pincé.

Ce qui m'amène à cette conclusion : quand une selle n'est pas adaptée au cheval par sa conception même, elle aura beau avoir été faite sur mesure pour le cavalier, ça n'ira JAMAIS.

Pour ma part, j'ai pris une selle de dressage d'essai au design adapté à la morphologie du Palefroi (panneaux compensés à l'arrière, sanglage à la pointe de l'arçon) mais absolument pas "sur mesure" pour personne, et à mon goût pas la plus confortable de la terre. Je l'ai équilibrée de sorte à ce que ni devant, ni derrière, Princesse ne soit gênée... et ils nous ont offert un joli répertoire de pas étendu, de trot de travail, d'appuyers et de galop moyen (chose qu'elle n'osait plus faire depuis longtemps), le Palefroi délié, et la cavalière tellement dans son cheval qu'elle ne pensait même plus à sa position (qu'elle a fort élégante). J'étais heureuse pour elle. Et admirative, parce que j'ai beau adorer monter à cheval, je pense que je n'aurais jamais eu sa patience et son courage.

Ce qui me ramène à mon credo que je martèle encore et toujours : une selle doit vous aider. Vous ne devez jamais lutter contre une selle. Si vous luttez contre votre selle, c'est qu'il y a un problème. Parfois il faut changer de selle. Parfois, une simple correction de tapis ou de sanglage, et vous êtes transformés. Et si la selle doit d'abord être adaptée au cheval avant de vous être adaptée à vous, c'est qu'il y a une raison : c'est son équilibre sur le dos du cheval qui fera qu'elle vous va... ou pas.

EDIT : je rajoute un commentaire de Princesse, qui m'a écrit quelques mois après cette expérience... qui me touche énormément, me fait très plaisir, et sourire à grandes dents.

Bonjour,

Juste un petit mot pour dire un grand merci à Eugénie. J'ai acheté une selle sur ses conseils fin juillet mais j'ai tellement changé de selle avec le même cheval que j'étais à moitié convaincue. Bref, c'est tout simplement incroyable, mon cheval à changé du tout au tout et du coup moi aussi !!! Premièrement, il n'y a plus de bataille entre nous pour la mise en main et ça c'est une révolution pour moi. Ensuite, je suis bien assise dans ma selle, du coup je ne tire plus du tout sur les rênes (je sais, c'est incroyable). De plus mon cheval ne baisse plus les oreilles lorsque j'arrive avec ma selle. Je ne regrette qu'une chose, c'est de ne toujours pas avoir reçue la sangle qu'Eugénie m'avait recommandée car c'est uniquement au moment du sanglage que mon cheval grince des dents. Bref, ce n'est pas psychologique, cette selle a changé nos relations entre mon cheval et moi. Désormais je peux galoper pendant un long moment sans me blesser. Je monte 4 fois par semaine minimum, chose qui était impossible auparavant puisque je me blessais constamment. Bref, merci Eugénie !!