Attention les gars (et les filles), SCOOP : le physique d'un cheval, ça évolue.
Ouais je sais, complètement dingue non?
On le voit particulièrement chez les jeunes chevaux - mais c'est un sujet que j'ai déjà traité ici, donc je n'y reviendrai pas.
Mais si chez les chevaux adultes, le squelette n'évolue plus, on peut tout de même noter des changements au niveau musculaire et graisseux. Hé ouais, pas de mystère : le cheval c'est comme nous autres humains, y a des périodes de sa vie où il va être plus ou moins gros, plus ou moins musclé... et qu'on ne vienne pas me taxer d'anthropomorphisme, les effets du temps qui passent, c'est pour tous les êtres vivants pareil, vous, votre cheval, votre cochon d'Inde : tous dans la même galère, et la fin est la même pour tous. BREF.
Il convient donc de s'informer sur les facteurs qui peuvent amener à ces changements. Qui sont nombreux, sinon ce serait trop facile. Alors on va faire ça en liste, du plus au moins évident, ce sera plus simple.
1. le travail
Le travail fourni par un cheval est déterminant au niveau de sa morphologie. C'est comme nous : plus on fait de sport, plus on sera musclé et "fit" ; et c'est sur le long terme que l'on en voit les bénéfices. Donc un cheval qui bénéficiera d'un travail régulier sera en meilleure forme physique globale qu'un cheval aux sorties plus épisodiques, et sa selle lui ira toujours à peu près de la même façon, puisqu'il garde un niveau d'exercice constant donc une forme physique à peu près constante. A l'inverse, pour un cheval qui ne fera rien pendant longtemps puis se cognera d'un coup 15 jours de rando, ça va faire tout drôle, et en 15 jours de temps on verra un changement assez radical. Ce n'est donc pas tant l'intensité du travail que sa régularité qui compte, au niveau de l'impact de la selle.
La façon dont on mène ce travail est également très importante. Un cheval bien travaillé, dans le bon sens, aura un meilleur dos qu'un cheval bossé à l'arrache, relevé ou plaqué artificiellement. Non qu'il soit de mon ressort de vous donner des leçons d'équitation, mais n'oubliez pas que musculairement, il faut alterner des phases de travail en contraction et en élongation de sorte à pouvoir avoir des bénéfices visibles. Travailler uniquement en élongation ne sert à rien, travailler uniquement en contraction c'est pire, ça finit par faire mal. Un bon dos doit être tonique et souple à la fois. Trop de gens s'extasient sur des dos "en béton armé". C'est bullshit. Cette fixette qu'on fait sur le dos, uniquement le dos, c'est n'importe quoi : c'est l'ensemble qu'on doit travailler, quitte à renforcer s'il y a des points faibles. Néanmoins ce n'est pas une excuse pour ignorer non plus la problématique du dos. Mais plutôt que de vous focaliser sur UNE partie du corps de votre cheval, considérez-le dans son ensemble. Ayez conscience de ses forces et de ses faiblesses, et travaillez-le en conséquence.
2. le mode de vie
Sans faire ma hippie-étho-baba cool kikoolove, un cheval, ce n'est pas fait pour être enfermé dans 9m² 23h / 24. Des millénaires d'évolution ont fait du cheval un animal des grandes étendues, qui marchait en moyenne une vingtaine de bornes par jour. Physiquement, il a donc besoin de pouvoir bouger, s'étirer, courir, se rouler... Un être humain représente environ 1/4 du volume d'un cheval, et pour un humain, on estime qu'une chambre d'étudiant de 9m², c'est vraiment la loose et y a la place pour rien... et on enferme un gros animal dans le même espace. Allô paradoxe bonsoir!
Je ne condamne cependant pas les personnes qui gardent leurs chevaux au box pour des raisons diverses et variées. J'en conviens, quand on a un cheval au boulot, avoir un box, c'est pratique, et pour le cheval, c'est même une certaine source de confort puisqu'il peut être au calme, au sec et tranquille pour la nuit, pouvoir se reposer sans avoir à se soucier de rien. Mais en journée, il doit pouvoir se défouler, et autrement que dans un manège poussiéreux pendant 20 minutes avec la chambrière au cul, ou sous la selle de son cavalier. Une demi-journée au paddock, ça me semble être un minimum.
Néanmoins, ceux qui comme moi ont des chevaux qui vivent au pré intégral le savent, il est compliqué de garder un cheval vivant en extérieur dans un état constant. La composition et la richesse de l'herbe évoluant en fonction de la météo, sur une même parcelle, on aura des chances d'avoir plusieurs chevaux dans l'année : la barrique l'été, le "fit juste-bien-mais-pas-moins" l'hiver. Ce qui m'amène donc au point suivant :
3. l'alimentation et le métabolisme
Là encore, la comparaison avec l'espèce humaine est simple : de notre régime alimentaire dépend en grande partie notre condition physique. Et nous ne sommes pas tous égaux devant la bouffe (mère Nature si tu m'entends, j'aurais quand même apprécié un peu plus de gratitude de ta part à ce sujet).
Un shetland et un trakhener, pour prendre deux extrêmes, n'ont pas les mêmes besoins. Si on échange les deux rations, y a des chances pour qu'en peu de temps on se retrouve avec la SPA sur le dos parce que le trak ressemblera à un tréteau, et le shet aura probablement claqué de fourbure.
De façon générale, un cheval dit "de sang" aura besoin de rations plus riches (d'où l'appellation "grange à foin") et d'un travail plus constant qu'un cheval de race rustique pour rester en état. Le rusticos, lui, se contentera d'assez peu pour faire plus envie que pitié (voire devenant un cauchemar au printemps puisque doublant de volume dès l'apparition de l'herbe nouvelle).
En fait, dans un cas comme dans l'autre, on luttera pour les garder en état, mais l'un dans le sens "+++" et l'autre dans le sens "---". Pis y a ceux qu'ont de la chance et qui quoi qu'ils fassent resteront stables. Chienne de vie.
4. les pieds
Pas de pieds, pas de cheval. On n'y pense parfois pas assez, on y pense parfois trop. Mais c'est vrai. De l'état des pieds du cheval, de sa façon d'être "dans ses baskets", dépendra le reste de son état. Une mauvaise ferrure, un mauvais parage peuvent se répercuter sur l'ensemble du cheval. On pourra ainsi avoir un cheval qui creusera le dos et relèvera inconsidérément l'encolure juste parce qu'il aura été ferré trop serré. L'exemple de la jument d'Adrien est flagrant, en terme d'impact des pieds sur le reste du physique et donc, sur l'adaptation de la selle.
5. le reste du corps
On peut appliquer l'exemple des pieds au reste du corps : un blocage ostéo, une inflammation des ovaires, des vers enkystés, des dents mal gérées, un conflit des processus épineux et que sais-je encore... tout peut avoir un impact sur le comportement du cheval au travail, et donc la selle peut devenir la stigmatisation d'une douleur. La selle elle-même peut causer la douleur certes, mais pas toujours : c'est pourquoi il faut considérer les choses dans leur ensemble. Par exemple, j'ai lu il y a peu l'histoire d'une jument qui s'effondrait au sanglage. Ben en fait, elle avait une côte fêlée.
6. le mode d'élevage
7. l'alignement des planètes
Non je déconne, quoique, y en a ptet parmi vous qui y croient.
Voilà. J'ai listé les éléments les plus importants à prendre en compte. On peut donc comprendre que la selle d'un cheval devra évoluer en même temps que son physique. Alors attention : je ne parle pas de se mettre à psychoter comme un cinglé dès qu'on a l'impression que Chouchou a pris un trou de sangle. Mais il convient d'être attentif à quelques détails, comme le comportement du cheval sous la selle (signes de rétivité? sensation d'une locomotion étriquée?), l'état du dos du cheval (muscles qui se creusent, apparition de gonfles ou de poils blancs) ou encore les sensations du cavalier lui-même (changement d'équilibre, difficulté à accompagner à l'assiette tout d'un coup). Bon, les sensations du cavalier peuvent être elles-mêmes altérées par son propre état de santé physique (souplesse, musculature, état ostéo, embonpoint...), donc il faut réussir à trier entre toutes ces sensations, ce qui n'est pas chose aisée, j'en ai conscience.
Petite série de photos pour finir, ce qui permet d'illustrer mon propos. Voici Koko, le cheval de Lisa.
A 5 ans
A 7 ans
13 ans, 02/2011 (en surpoids)
2 mois plus tard, après un petit régime
Octobre 2011
On voit bien l'évolution, entre le dos anguleux avec un garrot marqué entre 5 et 7 ans, puis 4 ans + tard, un dos bien large, des épaules qui se sont ouverte, une ligne de dos retendue... On voit également la différence avant et après régime, entre février où il rivaliserait avec une belle barrique, et avril où il se contente du format joli tonnelet =)
Alors, mes conseils dans tout ça? ben, essayer de déterminer puis de contrôler au mieux les apports nutritionnels (avec le véto, ou des personnes expérimentées), si possible adopter un rythme de travail régulier avec un cheval qui peut bouger tous les jours même quand il ne bosse pas, et s'entourer de bons professionnels qui sauront déceler les blocages récurrents, entretenir correctement les aplombs et les pieds, et vous guider dans le boulot. Essayer également d'en savoir + sur le passé de votre cheval (pas toujours facile, c'est sûr).
Au niveau de la selle, l'establishment anglais recommande au minimum une visite par an du saddle fitter, pour vérifier à la fois l'adaptation de la selle et son bon état, de préférence lors d'un changement de saison important (donc automne et/ou printemps). Si vous ressentez néanmoins le besoin de le faire intervenir plus souvent parce qu'il y a des signes manifestes de gêne, d'inconfort voire de rétivité, il ne faut pas hésiter!
Bon euh ça nous ramène au problème number one : qui appeler en France. Sur votre droite, une liste de gens plus ou moins fiables, en haut de la page un formulaire de contact pour me joindre, et toujours la page Facebook du blog =)