Voilà donc la suite des aventures de Catherine Haddad et de son sellier.

A propos de la selle, 2e partie - La Stübben Genesis Special.

C'est pas souvent que je balance mon numéro sur Internet, mais allez, juste pour vous : 282231. C'est le numéro de série de ma nouvelle selle, que nous avons designée ensemble avec Stübben Suisse. Ouaip les copains, votre dévouée a finalement mis un terme à la longue et précieuse collaboration que j'ai eue avec ma vieille Schultheis.

La nouvelle selle s'appelle la Stübben Genesis Spezial (ou Special), ce qui prête un peu à confusion dans la mesure où cette création est plutôt basée sur les caractéristiques de l'ancienne Tristan Extra que de la Genesis. Peu importe. Cette selle c'est la meilleure chose mise au point depuis le pain en tranches. Je ne connais pas le numéro de série pour une Stübben Genesis Special, mais si vous voulez une selle avec les mêmes spécificités que la mienne - courbure, taille, profondeur de siège - Stübben peut la fabriquer en se basant sur l'un de ces numéros de série : en marron avec des panneaux noisette : Q282531 ou tout en noir : Q282231.

Toutes deux ont des sièges Biomex 18", un arçon ouvert en 31, 4 contre-sanglons court, du cuir grainé pleine fleur que les quartiers et du cuir très fin et très beau sur le siège et les avancées de quartier. Voilà les principales caractéristiques de la Stübben Genesis Special. Vous pouvez bien sûr changer ces paramètres si vous le voulez - bien que je recommande des panneaux couleur noisette, quelle que soit la couleur que vous choisissez.

Les trois vidéos suivantes expliquent en images pourquoi j'ai sélectionné toutes ces caractéristiques, et ce qu'elle peut apporter aux cavaliers qui sont à la recherche de confort, d'un contact rapproché, d'un bon sentiment du cheval et d'un équilibre parfait à cheval. Il va sans dire que c'est un sujet qui me passionne.

[les vidéos sont en anglais, je les traduis donc rapidement]

Partie 1: Le nom, ma vieille Stübben Tristan Extra, les panneaux, le siège Biomex, les cuirs.

Au début elle explique donc ce qu'elle dit dans le premier article au sujet de sa vieille Schultheis, comment elle en est venue à la montrer à M. Stübben au CDI de Lyon en 2009, qu'elle n'était pas satisfaite de la nouvelle version de cette selle (la Tristan Extra). Stübben lui propose alors, en se basant sur ses registres, de lui refaire une selle avec les mêmes caractéristiques, mais en version modernisée.

Les deux selles sur la droite sont les nouvelles versions de la Tristan Extra "Schultheis", qui s'appellent un peu bizarrement Genesis Spezial (expliqué pourquoi ci-dessus). La seule chose qui vient du modèle Genesis c'est le quartier, qui est coupé un peu plus en biais que celui de la Tristan originale, mais la forme du siège se rapproche plus de la Tristan. Sa préférée c'est la marron, avec les panneaux + clairs (non teints), elle trouve qu'avec cette couleur de cuir, les panneaux en cuir "naturel" ont un toucher différent des panneaux noirs de la selle noire. Les cuirs colorés sont plus souples et tendent à s'écraser + rapidement. Elle a déjà monté avec les 2 selles, + avec la marron, elle a même fait Falsterbö avec [un CDI étape Coupe du Monde je crois]
La selle qu'elle montre ensuite est flambant neuve, en couleur havane - couleur des toutes premières selles Schultheis. On voit bien les deux types de cuir différent, un cuir épais pleine fleur (visiblement grainé) sur les quartiers, et un cuir plus fin et plus souple [du veau probablement?] sur le siège et les avancées de quartier que Stübben appelle le De Luxe, très souple, très agréable, et qui se "casse" très bien. Le truc c'est que comme il est plus fin, il s'abîme plus vite.

Le siège Biomex est l'innovation majeure sur cette selle, et c'est d'après Catherine LE truc qui en fait l'une des meilleures selles du marché. Biomex est le nom d'une boîte d'ergonomie suisse, et qui travaille à libérer les tensions basses que la colonne vertébrale accumule en position assise. La première fois que M. Stübben lui a montré ça à Lyon en 2009, elle l'a regardé comme s'il était défoncé [elle rigole, se reprend], comme s'il était fou ; mais bon, elle a tenté... et depuis qu'elle a essayé ça, elle n'a jamais fait machine arrière! Les ischions s'installent sur les coussins latéraux, et la gouttière au milieu permet au coccyx de se placer librement, ce qui le libère des pressions. A l'école de Schultheis, elle a appris à fonctionner à l'assiette, et ce système de siège lui permet d'affiner encore ses aides au niveau du bassin. En cas de problèmes dorsaux, c'est un vrai bonheur.

Le petit quartier est tout simple, ce qui contribue à rapprocher le cavalier de son cheval.
[elle tourne la selle, la présente de face] Il n'y a pas de taquets avant! Les avancées de quartiers sont un peu plus matelassées que d'ordinaire, ce qui permet de caler légèrement son genou sans le bloquer ; elles remontent assez haut. Sur la vieille Schultheiss, ces avancées sont drôlement plus basses, donc ça cale moins - et c'est la seule chose qui change au niveau de la jambe. Sa conclusion sur cette adjonction "oh yes, oh yes!" Pas besoin de traduire...

Partie 2 : Pourquoi un siège 18"?  Détails de l'arçon, des contre-sanglons, de la sursangle, des panneaux et de leur rembourrage. (j'ai dit une bêtise lors de l'enregistrement, l'arçon est en fait en plastique moulé renforcé d'acier et mis en forme avec une épaisse toile - le cadre n'est pas acier. Whoopsie)

La plupart des gens ne pensent pas avoir besoin d'un siège en 18", mais en fait, quand on s'assied correctement, les ischions seront toujours positionnés +/- au même endroit sur la selle, assez en avant. Du coup, cette place supplémentaire permet d'orienter son bassin comme on veut, de reculer un peu son assise si besoin, mais ça permet d'être assis assez proche du garrot, donc bien au-dessus du centre de gravité du cheval. Tous ces gros taquets qu'on voit maintenant obligent un recul de l'assiette, reculant artificiellement le cavalier.

P1040860La selle est construite sur ce que l'on appelle un "spring tree" [sorry je connais pas le mot en français], un procédé de construction d'arçon où l'on renforce l'arçon au moyen de bandes d'acier assez flexibles, ce qui permet d'affiner les bandes de l'arçon elles-mêmes et ainsi donner plus de souplesse et de légèreté à l'arçon.

La toile que l'on utilise pour bander l'arçon permet, en y mettant + ou - de tension, de donner à celui-ci la forme que l'on veut qu'il prenne. Mais l'acier a une résistance et tend à toujours revenir à sa forme originelle, ce qui peut créer un "effet trampoline", c'est pourquoi on appelle cet arçon "l'arçon ressort" [littéralement puisque "spring" = ressort en anglais - désolée de ne pas connaître le terme français!] La relative flexibilité de cet arçon lui permet d'accompagner les mouvements du dos du cheval. En tant que cavalier, on ne veut pas d'une structure absolument rigide qui nous empêche de suivre le cheval! La toile, c'est ce sur quoi on est assis (à travers le cuir et la mousse), c'est donc ce qui soutient le poids du cavalier. Le peu d'épaisseur de mousse sur le siège (hormis aux endroits Biomex), c'est ce qui donne cette impression de close contact.

Sur la selle que Catherine utilise, elle a fait rajouter un rivet à la couture de la sursangle au quartier - tradition héritée de l'école Schultheis - pour renforcer la couture, qui est cousue directement sous la jambe du cavalier et qui est donc susceptible de lâcher avec le frottement de la jambe du cavalier. Elle explique qu'elle recommande un sanglage haut et une longue sangle sans élastiques parce que ça solidarise mieux la selle sur le dos du cheval qu'un sanglage bas et une sangle courte. Ses sangles, elle les prend à brins, parce qu'elles suivent mieux les mouvements du cheval.

Elle exige systématiquement 4 contre-sanglons pour bénéficier d'un maximum d'options de sanglage. Si on a un cheval qui n'a pas un bon garrot, sur lequel la selle tend à partir vers l'avant, on utilise le "point strap" (le contre-sanglon attaché à la pointe de l'arçon, donc le n°1) et le 3e contre-sanglon. Sur un cheval bien foutu, on utilise les CS n°2 et 4.

Le faux quartier est en cuir bien rigide, résistant à la sueur et super costaud.

Elle ne recommande pas d'avoir des panneaux qui s'écrasent bien à plat sur le dos du cheval jusqu'au bout, étant donné qu'on s'assied plus sur la partie avant de la selle [quand, comme elle, on prend du 18" et on n'en remplit qu'un petit bout - la forme du panneau à l'arrière dépendra du placement du cavalier dans la selle et de la morphologie du cheval, plus on s'assied en arrière et plus le panneau doit poser et offrir du soutien]. L'important, donc, c'est l'avant des panneaux, quand on s'assied comme elle le préconise.
Ses panneaux sont rembourrés en laine, un matériau qui s'écrase et prend la forme du dos du cheval et permet de rapprocher le cavalier du dos. Elle dit ensuite que tant que la forme de l'arçon est correcte, on peut ajuster les panneaux comme on veut, avec plus ou moins de laine en fonction de la morphologie du cheval - ça permet d'équilibrer la selle en fonction du dos. Si on rajoute de la laine à l'arrière du panneau, on redresse l'arrière de la selle, si on rajoute de la laine à l'avant, on redresse l'avant - ce que l'on fera dépend entièrement de la morpho du cheval. Pour "faire" des panneaux laine, ça prend environ 6 semaines de monte régulière. Au bout de ces 6 semaines, Catherine la fait reflocker un peu pour équilibrer le travail du cassage. En ce qui concerne cette selle, elle fera rajouter de la laine tout du long des panneaux pour l'élever un peu au dessus du dos du cheval.

L'arçon est ouvert en taille 31, ce qui correspond au gabarit d'environ 95% des chevaux qu'elle monte. Auparavant elle a essayé le 32, mais elle trouve que le 31 est plus facile à faire correspondre à la majeure partie de ses chevaux. Elle compense les éventuelles irrégularités avec des pads qui réhaussent l'avant ou l'arrière en fonction des besoins - voire un petit pad en gel.

Avec ces 2 tailles, 18" et 31 d'ouverture, c'est la selle la plus versatile que l'on puisse trouver. [ATTENTION je rappelle qu'on parle là de chevaux de dressage, qui ont généralement une conformation similaire - on ne parle pas d'un gros cob ou d'un petit arabe]

La sursangle permet de bien plaquer les quartiers, ce qui est pratique quand on monte avec de la colle à bottes et une selle à double quartier [si on recule la jambe, on embarque le quartier avec soi. Oups] Avant de monter, chez Schultheis, on met un coup de savon glycériné pour donner un peu de grip au cuir. Ca permet donc de bien envelopper le cheval dans les quartiers, et d'en rajouter à l'effet close contact.

Partie 3 : Où l'on parle de comment ajuster la selle (avec Cadillac en guest model), de l'utiliser [la selle, pas Cadillac], quid des sangles longues, comment situer le centre du déplacement VS le centre de gravité, et utiliser un bidule à sangler.

Voilà la selle Genesis Special marron, pas encore complètement cassée, sur le dos de [l'immense] Cadillac.

Une fois la selle cassée, on ne veut pas la voir avoir un mouvement de balancier (faire avant / arrière sur le dos, en donnant l'impression de ne poser qu'au centre des panneaux). Le quartier est coupé bien droit, pour dégager l'épaule, et tombe quasiment à la verticale. Une fois la selle bien cassée, on doit avoir 3 doigts entre le pommeau et le garrot - certains selliers vous diront que 2 c'est assez, mais avec un "spring-tree", ce n'est pas assez. On ne veut aucune pression sur le dessus ou les côtés du garrot, donc la largeur doit être bonne.
On voit que les panneaux sont fins, et qu'ils permettent un contact rapproché du cavalier avec le cheval. Comme ils sont bien coupés, la sangle est bien reculée, ça n'interfèrera pas avec le mouvement de l'épaule. La conception de cette selle lui permet d'être légèrement plus avancée sur le dos du cheval que la plupart des selles actuelles.
A son goût, les selles conçues pour être plus reculées sur le dos ne sont pas intéressantes parce qu'elles placent les ischions du cavalier trop près des reins du cheval (le siège du déplacement) [et de la transmission de l'énergie de l'arrière-main vers l'avant-main], position qui amplifie les mouvements à encaisser pour le cavalier donc qui rend son assiette plus difficile à conserver. Il faut être positionné au-dessus du centre de gravité du cheval, qu'elle montre comme étant au passage de sangle, au tiers inférieur de la cage thoracique. Ca permet d'avoir les genoux placés sur les avancés de quartiers, et pas derrière, comme c'est le cas avec tous ces énormes taquets! or les avancées de quartiers sont initialement prévues pour accueillir les genoux du cavalier, pas pour les repousser. Le genou ne doit pas être placé sous les ischions, il doit être bien devant!

Quand on achète une nouvelle selle "wool flocked", la laine n'est pas tassée. Ca peut donner l'impression d'une selle trop étroite devant. Ne paniquez pas, sanglez votre selle, montez avec, et déjà au bout d'une semaine où ça aura commencé à se tasser, ça ressemblera déjà plus à ce que ça devrait être idéalement. Au début, les contre-sanglons auront l'air trop courts ; mais entre un léger étirement / assouplissement de ceux-ci du fait de l'usage, et le tassement des panneaux, ils finiront par être parfaits. Catherine a du coup fait des trous pour pouvoir sangler les deux qu'elle utilise, vu que sa selle est neuve. C'est donc possible que vous ayez besoin d'une sangle plus longue que d'habitude pour commencer.

La selle noire, maintenant.

Pratiquement pas utilisée, donc elle a besoin d'être cassée. On voit d'ailleurs qu'elle pose un peu haut au niveau du garrot. D'ici une semaine, si Catherine l'utilise, ça ira mieux. Après 6 semaines d'utilisation, faites revenir un "saddle fitter" de chez Stübben pour vérifier l'adaptation de votre selle pour être bien certain que la selle pose sur le cheval de la façon dont elle doit poser.

Voilà un "girth crank" [faute de connaissance d'un tel outil en français, je l'appellerai "le bidule à sangler" - c'est rigolo ce gadget]. Apprenez à l'utiliser, ça vous rendra la vie plus simple [encore faut-il savoir où en trouver!]. Ca permet de ressangler sans forcer, mais du coup, on maîtrise mal la force que l'on met dans le sanglage, au risque de couper le souffle à Bijou - vous savez que vous avez trop serré si vous êtes incapable de dessangler après! Ici on fait toujours marcher les chevaux entre les ressanglages, pour éviter de les stresser en les sanglant trop fort d'un coup. Elle veut voir, idéalement, les boucles placées sur les trous du milieu, les 3e ou 4e dans son cas. Ils se placent ainsi dans le creux du genou, et du coup, ne gênent pas le contact de la jambe. La sursangle se ferme uniquement une fois que la sangle est ajustée correctement au cheval. On ne la serre pas trop, on l'ajuste, simplement. Si on la serre trop et que le cheval fait un truc pas prévu, elle pourrait casser.

Dernier "truc", si vous utilisez cette selle avec des étrivières classiques, vous pouvez glisser le flot dans le passant normal, ou carrément à l'intérieur du quartier. Elle utilise un montage étrange pour le flot, en le faisant passer sur l'avant, un truc de chez Schultheis.

Et enfin, la colle à botte, qui n'est guère plus que de la résine de pin. Ca permet de bien placer ses jambes pendant les 10 premières minutes de monte, et ça évite aussi d'user prématurément le haut des bottes à cause du frottement sur les quartiers, et ça préserve, de même, les quartiers des frottements des bottes.

Et si vous voulez voir la selle utilisée sur Cadillac, monté en RLM par Catherine à l'occasion du CDI de Londres en 2009... je suis personnellement très impressionée par son assiette au trot, avec cette selle qu'on pourrait penser trop grande pour elle, et sans un pet' de taquets (c'était encore sa vieille Schultheis, visiblement).