Voici le dernier aphorisme qui m'est venu en tête, au fil de discussions avec plusieurs personnes (d'abord sur un forum, puis avec Aurélie l'autre jour dans la voiture). Je racontais je sais plus quoi, et puis j'ai failli partir dans ma diatribe habituelle de franchouillarde mal dégrossie "les gens sont cons", tout ça tout ça.
Mais en fait, non. Les gens ne sont pas cons, les gens sont ignorants. L'ignorance, ce n'est pas un signe de bêtise. L'ignorance, c'est simplement que personne n'a jamais appris aux gens ce qui était juste ou pas. Etant douée d'une curiosité naturelle plutôt poussée, j'ai tendance à faire toujours des recherches sur tout et n'importe quoi, du coup j'apprends plein de trucs... et j'ai du mal à concevoir qu'on ne soit pas comme moi (note pour plus tard : la tolérance, c'est bien aussi). Bref, mon caractère de cochon n'étant pas la question, revenons à la question première : comment remédier à l'ignorance? et pourquoi sommes-nous ignorants?
Le pourquoi, c'est pas compliqué, en matière de chevaux. Autrefois, les gens vivaient avec les chevaux, ils les connaissaient par coeur, ils travaillaient avec eux. Puis le cheval de loisir a supplanté le cheval de travail, et l'on venait au manège pour faire un coup de radada, sauter trois piques et puis s'en va. La relation au cheval a disparu, de même que leur connaissance. C'est pour cela, je crois, que le courant des chuchoteurs et autres éthomagiciens marche tellement bien. J'aime assez comparer ça à la collection de bouquins "pour les nuls", vous savez? c'est super bien foutu, et ça explique de façon claire et pédagogique comment tout et n'importe quoi marche. Ben l'éthoprout, ou plutôt le comportementalisme équin (puisque l'éthologie est une discipline scientifique qui n'a rien à voir dans l'interaction homme/cheval, elle aide juste l'homme à comprendre le cheval mais c'est tout), ça vient pallier les gros manques de naturel qu'on a avec nos chevaux. On ingère des méthodes pour devenir gens de chevaux, ceux qui comprennent le but des manipulations telles que le join-up ou les jeux et les utilisent à bon escient deviennent des gens de chevaux décents, ceux qui ne comprennent pas lobotomisent leurs chevaux et les transforment en radis à sabots avec la capacité d'initiative d'une mouche sous Tri-tec ( = pas vraiment fougueuse, la mouche). Passons sinon je vais redevenir franchouillarde en gros sabots.
Bref, autrefois, la relation au cheval était question de bon sens, voyez? le bon gros sens paysan, un truc simple, qui sent la terre mouillée et l'huile de vidange, un peu. Mais simple. Sans chichis. Bien, quoi. Et c'est pour ça qu'autrefois, les gens SAVAIENT qu'un cheval de selle, il lui fallait une selle adaptée. Les chevaux de trait, il leur fallait des colliers adaptés. En un mot : on faisait du saddle fitting sans savoir qu'on en faisait parce que c'était normal, c'était le bon sens, voilà, c'est tout.
LE BON SENS. Voilà, le mot est lâché. C'est juste du bon sens de mettre une selle adaptée sur le dos d'un cheval. C'est comme, je sais pas, vous êtes invitées à un mariage, mesdames, vous mettez des escarpins pour faire chic, et vous prévoyez vos ballerines dans le sac à main pour vous dandiner sur la piste de danse après le trou normand, parce que vous SAVEZ que vous allez avoir mal aux pieds avec ces foutus talons de 12. Ben voilà. Votre cheval, vous imaginez que sa selle trop serrée, c'est des talons de 12, et que vous lui demandez d'enquiller le parcours de 12 obstacles, 15 efforts, en talons de 12. Pas sympa... et surtout, c'est pas vraiment faire preuve de bon sens, si vous tenez à lui, vous ne voulez pas lui faire mal, non?
Et j'en arrive à ma 2e question (je suis super digressive là quand même) : comment remédier à l'ignorance?
En réfléchissant. En observant. En vous posant des questions. En faisant preuve de curiosité intellectuelle. En parlant avec les gens qui savent - tout en vous méfiant, ceux qui savent ne sont pas forcément ceux qui cherchent à vous persuader qu'ils savent, eux en général, ce sont des outres gonflées d'air.
Mais malheureusement, les gens qui en équitation sont censés transmettre le savoir, bien trop souvent, ne savent pas eux-mêmes - du moins en matière de sellerie. Dans la formation BPJEPS, il n'y a RIEN sur la selle. Dans les galops, à part deux trois vagues questions sur comment on différencie le petit quartier du grand et dans quel sens on la pose sur le dos du cheval ("alors attends, le troussequin, c'est devant ou derrière?" "derrière!"), RIEN non plus - même pas une explication sur comment positionner la selle sur le dos, et surtout pourquoi. Alors qu'on vous fait gober stupidement tous les noms des os et des muscles au Galop 5 - je parie que tous ceux qui ont passé leur galop 5 ne s'en souviennent pas, à part peut-être de l'atlas et de l'axis, qui ont des noms super cool. Mais on ne vous explique rien sur pourquoi et comment tout ça interagit ensemble, et comment ça se passe dans l'activité équestre, rapport à la locomotion, tout ça tout ça. RIEN.
Le système pédagogique de la FFE est encore pire que celui de l'Education Nationale, c'est dire. (non je ne donnerai pas mon avis sur l'Education Nationale, chut, chut, suffit!) Aujourd'hui, quand on arrive au galop 7, si on a suivi religieusement son cursus de club, on ne sait rien. Si, on sait piloter un cheval dressé, voilà. Mais tous les comment et les pourquoi, ça vient après. Et là, c'est le drame, y a plus rien...
C'est un peu comme le permis de conduire, tiens. Au permis, tu passes ton code, tu fais tes 20h, ton mono te juge naze et te fait raquer 4 5 séances supplémentaires histoire d'arrondir un peu la fin de mois, tu passes ton permis, tu le rates, tu repasses ton permis, et ça y est, t'as le précieux papier rose! (où tu as la tronche de tes 16 ans que tu regretteras toute ta vie). Et t'achètes une voiture. Et là, c'est le drame (bis). Sérieusement? j'ai acheté une voiture y a 1 an et demi. J'ai découvert après avoir un jour, par hasard, ouvert ma carte grise qui est toujours sagement rangée dans mon sac à main, qu'il fallait faire une révision - une quoi??? Bon. Et là, à la révision, on me dit "contrôle technique" (et qu'en plus, la voiture ne passera pas le dit contrôle, argh! 1000 balles de réparations, hop là!). Et là je re-bugge. Pourquoi personne m'a jamais appris à être propriétaire d'une voiture?
Bon. Avoir un cheval, c'est pareil, en pire, parce que ça mord, ça donne des coups de tête et de sabots, ça coûte cher en carottes et en tapis Equi-thème (enfin non, maintenant la mode c'est BR paraît-il, moi j'y connais rien).
Alors, rappelez-vous de cette phrase de mon père, ce saint homme : "quand vous êtes confrontés à un spécialiste et que vous n'y connaissez rien, si vous ne voulez pas vous faire entuber, il faut en savoir au moins autant que lui". Amen. Ne soyez pas victimes ou spectateurs de votre relation avec votre cheval, vivez-la. Que ce soit en éthoprout, en pieds nus, en CSO, en endurance, en saddle fitting, en n'importe quoi : soyez critiques, et posez vous les bonnes questions.
Sinon, à vous les pigeonnages à tire-larigot par Jean-Michel, Jean-Claude et Jean-Cédric!
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j'arrive même à t'imaginer dire tout ça!
en effet, moi, il y a bien longtemps que j'ai compris qu'il fallait etre + spécialiste que les spécialistes!
oui, oui, je suis une fille , j'ai une voiture et déjà eu à faire à des garagistes macho et escrocs